Aller au contenu principal

Outil pédagogique

Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce

Réflexions sur l'effondrement

couler.jpg

"Notre société déborde de trop-plein, obscène et obèse, sous le regard de ceux qui crèvent de faim. Elle est en train de s'effondrer sous son propre poids. Elle croule sous les tonnes de plaisirs manufacturés, les conteneurs chargés à ras bord, la lourde indifférence de foules télévisées et le béton des monuments aux morts. Et les derricks continuent à pomper, les banques à investir dans le pétrole, le gaz, le charbon. Le capital continue à chercher davantage de rentabilité. Le système productiviste à exploiter main-d'oeuvre humaine et écosystèmes dans le même mouvement ravageur. Comment diable nous est venue l'idée d'aller puiser du pétrole sous terre pour le rejeter sous forme de plastique dans des océans qui en sont désormais confits? D'assécher les sols qui pouvaient nous nourrir, pour alimenter nos voitures en carburant? De couper les forêts qui nous faisaient respirer pour y planter de quoi remplir des pots de pâte à tartiner?"

Dans cet essai philosophique et littéraire rédigé à la première personne, la militante écosocialiste Corinne Morel Darleux questionne notre quotidien en convoquant le navigateur Bernard Moitessier, les lucioles de Pasolini ou Les Racines du ciel de Romain Gary. Elle propose un choix radical: refuser de parvenir et instaurer la dignité du présent pour endiguer le naufrage généralisé.

Avis et conseil d'utilisation

Dans cet essai philosophique et littéraire truffé de petites réflexions sur notre société, nos comportements et notre marge de manoeuvre individuelle, l'autrice propose un cheminement vers l'action via trois règles de vie: refuser de parvenir, cesser de nuire, cultiver la dignité du présent. Ces petits pas de côté sont le carburant permettant de continuer à se battre pour des improbables victoires à venir.

Son approche "dans l'action" est intéressante. Avec cette idée de lutter, même si la lutte n'aboutit pas, même si effondrements il n'y aura pas. Notamment l'idée de la "dignité du présent" : "Même quand on a l'impression que l'avenir est très sombre, même quand on est pas sûr de gagner à la fin et même si on perd à la fin, il y aura au moins une chose qu'on aura pas perdue, c'est cette dignité, cette capacité à être debout, à lutter, à inventer, à tenter des choses et ça personne ne pourra nous l'enlever." (in: interview Reporterre, fév. 2020: http://www.youtube.com/watch?v=Xa6aJS2wlO8). L'idée de se construire dans l'action, en somme, donne un élan plus positif que certains discours effondristes basés sur les constats et le repli sur soi (ou en petits groupes). C'est aussi une femme (peu présentes dans le sphère effondriste). C.T.

Autres citations de l'autrice, Corinne Morel Darleux:

- Et si "faire un pas de côté", refuser de nuire, choisir une certaine sobriété, dépendent de conditions structurelles, elles dépendent "aussi des conditions culturelles, de la formation d'un esprit critique, de capacité de raisonnement autonome: en un mot d'éducation." (extrait cité par Daiel Cauchy: http://rencontredescontinents.be/Presentation-de-Plutot-couler-en-beaute-que-flotter-sans-grace.html).

- "Le pari consiste non pas à croire mais à agir: que l'effondrement arrive ou non, nous avons tout à y gagner." (sur le blog de l'autrice "Revoir les lucioles": http://revoirleslucioles.org/ya-t-il-un-sens-a-predire-la-fin-du-monde/).