Faites-le vous-même(s) !
Faire soi-même : activité détente ou militante ?
Découvrir et faire soi-même des recettes de « produits du commerce », comme des sacs, des meubles, des conserves, des produits cosmétiques, des habits…Cela peut paraître simple, bobo, ringard, du banal « loisir créatif ». Mais, selon la manière dont c’est mené, cela peut devenir un cheminement éducatif, voire de résistance.
Imaginons un groupe de personnes qui découvrent, à l’occasion d’un atelier, qu’elles peuvent réaliser elles-mêmes des produits d’entretien, que c’est moins cher, amusant, meilleur pour la santé, moins nocif pour l’environnement, que cet atelier est l’occasion de rencontrer d’autres personnes… Chacun étant venu pour l’une ou l’autre de ces motivations.
Imaginons que l’animateur de l’atelier ait comme objectif, outre d’apprendre des recettes ou d’aborder des notions de chimie, celui de créer un climat propice au dialogue et de susciter le questionnement chez les personnes. La « sauce » prend lors de cet atelier, quelques commentaires et échanges démarrent en ping-pong entre les participants : quels produits emploient-ils habituellement ? Comment nettoient-ils ? Qui nettoie ? A quel rythme ? … Les propos évoluent peu à peu vers des considérations plus larges : pourquoi nettoyer ? Quel est l’impact des produits que nous utilisons sur la santé ? Et sur l’environnement ? De quoi sont-ils composés ? Pourquoi connaissons-nous tous ce slogan « Plus blanc que blanc » ? Comment choisir un produit devant l’étalage du grand magasin ? …
Et de s’interroger sur la toxicité de plusieurs produits d’entretien qui annoncent d’emblée sur leur étiquette qu’ils sont corrosifs, inflammables, toxiques ou chimiquement réactifs1. De s’inquiéter alors des conditions sociales et environnementales lors de la fabrication. Des motivations de la part des entreprises pour fabriquer de tels produits. Ou du législateur de les autoriser. Des intérêts économiques qui prévalent au détriment d’autres, sociaux, environnementaux, culturels. Et d’en arriver à questionner notre « pouvoir » en tant que consommateur, citoyen, travailleur… éducateur.
Ce questionnement est l’essence de notre travail en Education relative à l’Environnement (ErE) à travers une diversité d’approches et d’activités2, qui privilégient une entrée en matière concrète, le « faire » avant de « connaître ».
Ainsi, ces ateliers de savoir-faire, qui peuvent apparaître comme des loisirs amusants et occupationnels, peuvent aussi être, selon les intentions et le déroulement, des lieux qui donnent envie de réaliser et d’apprendre, de s’interroger, de réfléchir aux alternatives, de s’impliquer…
Nous espérons que ce numéro de SYMBIOSES vous inspirera, vous donnera l’envie de mettre la main à la pâte pour semer, en tant qu’éducateur, des petites graines de résistance face aux standards de la surconsommation.
Joëlle VAN DEN BERG
1. « Trop d’hygiène peut nuire », Symbioses n°66, Printemps 2005, p. 6
2. Pour en savoir plus sur l’ErE et ses différentes approches : www.cacomptepourvous.be/ere
Joëlle VAN DEN BERG
secrétaire générale du Réseau IDée