Utile ou inutile ?

Étape 1 : découverte d’une friche

Les élèves se baladent sur une friche (industrielle, ferroviaire, commerciale…). L’enseignant·e les invite à se questionner sur ce lieu : où sommes-nous ? Qu’est-ce que ce lieu ? Qu’y voyez-vous ?...
Après avoir récolté les réponses des élèves, continuer le questionnement en leur demandant : comment était occupé précédemment ce lieu ? Quelles traces du passé relevez-vous sur cet espace ? 
Idéalement, l’enseignant·e aura préalablement fait des recherches et apporté des cartes anciennes et des photos de ce lieu tel qu’il était occupé dans le passé (industrie, commerce, chemin de fer…). Cela permettra aux élèves de se projeter plus facilement.

Étape 2 : la notion d’« utilité »

Cet espace en friche était autrefois occupé par une activité économique. Aujourd’hui, il est délaissé car il n’a plus aucune « utilité » (formulation volontairement provocatrice). 
Inviter les élèves à clarifier le mot « utile » en partant d’exemples de situations où ils l’emploient dans leur vie, puis à en proposer une première définition.
Exemples de questions : y a-t-il des exemples dans la vie de tous les jours où l’on parle de choses « utiles » ? Qu’est-ce qui est utile ? Qu’est-ce qui est inutile ? Quelle est la différence entre utile et inutile ? Comment pourrait-on expliquer ce que veut dire « utile », à partir de ces exemples ?
L’enseignant·e peut également s’appuyer sur le principe éthique de l’utilitarisme en philosophie pour guider les élèves.
Avant de poursuivre, rediriger un instant l’attention sur la friche pour leur demander d’observer ce qu’il y a autour d’eux afin qu’ils et elles se rendent compte que le lieu est réinvesti par une nature sauvage, spontanée, où l’humain est peu intervenu.

Étape 3 : représentations de l’utilité des êtres vivants dans la nature

Sur Terre, de nombreux êtres vivants peuplent la nature . Sur cette friche, on observe différentes plantes, des oiseaux, des insectes, sans doute aussi des mammifères… Proposer aux élèves de classer en 2 colonnes (« utile » vs 
« inutile ») les êtres vivants de la nature. Exemple : moustique = inutile (voire nuisible) / arbre = utile (CO2).
Dans un premier temps, les élèves réalisent ce travail individuellement sur une feuille puis une mise en commun est réalisée.
La mise en commun révèlera certainement des tensions et des contradictions entre les élèves sur l’utilité ou non de certains êtres vivants. Cela permettra de mettre 
en lumière leurs représentations de l’utilité de la nature. Creuser l’argumentation : « Et si vous étiez un moustique et que vous deviez défendre votre utilité, que diriez-vous ? » 
Conclusion intermédiaire possible : tous les êtres vivants ont une utilité dans la nature car ils participent à l’équilibre des écosystèmes, hormis les « invasifs » qui ont tendance à déséquilibrer ces derniers.

Étape 4 : conflits d’usages

Au-delà de l’utilité des êtres vivants qui l’habitent, la friche que nous avons visitée a-t-elle une utilité ? Si oui, laquelle ou lesquelles ? Pour qui ? 
L’enseignant·e demande aux élèves de lister les usages possibles de la friche, puis complète si nécessaire. Les friches peuvent par exemple être utiles pour  :

- redévelopper une activité économique,
- offrir un espace vert aux habitant·es, 
- accueillir des initiatives citoyennes et créer du lien social,
- sauvegarder la biodiversité,
- construire des logements,
- lutter contre les inondations et les changements climatiques,
- sauvegarder les traces de l’histoire du territoire,
- …

Ensuite, l’enseignant·e peut mener une discussion à visée démocratique et philosophique (1), en partant de cette question : « Parmi ces usages, lesquels sont les plus importants ? Pourquoi ? Certains sont-ils incompatibles ? »
L’enseignant·e endosse le rôle de président·e de séance et propose à quelques élèves d’être respectivement responsables de la reformulation, de la synthèse ou de l’observation des débats. Si c’est la première fois qu’un tel dispositif est mis en place au sein de la classe, l’enseignant·e en explique le fonctionnement, installe le cadre et distribue une fiche « mission (2) » à chacun de ces rôles.  
L’enseignant·e lance la discussion par un premier tour de parole : chacun·e a la possibilité de répondre à la question ou de passer son tour. L’enseignant·e est garant·e du bon déroulement de la discussion, met en lien les idées formulées, demande l’intervention des reformulateur·ices et des synthétiseur·ices, recentre la discussion si nécessaire.

Étape 5 : clôture et synthèse

Au bout de 30 minutes d’échanges, l’enseignant·e invite à clôturer la discussion. Il est probable qu’aucune réponse définitive ne soit apportée. Inviter alors les synthétiseur·ices à formuler un compte rendu des idées émises. Les observateur·ices peuvent à leur tour prendre la parole pour fournir leur analyse de la discussion.
Chaque élève peut ensuite rapidement exprimer son ressenti par rapport à la discussion vécue (météo des émotions).
Pour clôturer la séance, l’enseignant·e demande à chaque élève de rédiger une « sagesse du jour » (sorte de petit conseil ou précepte pour un· ami·e) qui résumerait la discussion qu’ils et elles viennent d’avoir. L’objectif étant ici qu’ils apprennent à formuler leur pensée par écrit sous une forme généralisante.

Activité librement inspirée par une séquence pédagogique du Philéas & Autobule N°60 « C’est où, la nature ? ». 
Dans la revue, la séquence est adaptée au primaire.

Corentin Crutzen

(1) Pour en savoir plus sur ce dispositif : https://www.philocite.eu/blog/wp-content/uploads/2017/11/PhiloCite_Presentation_DVDP_Tozzi.pdf ; https://www.icem34.fr/images/organisercooperation/Fiche12_DVDP.pdf  
(2) Exemple : https://www.icem34.fr/images/organisercooperation/Fiche12_DVDP.pdf